First beat – 15/04/2001

C’était une froide journée d’avril en Auvergne, qui s’annonçait grise et humide. La veille encore nous pausions devant la cascade gelée près de Mont-Dore, pas loin de la. Des trois nuits passées au milieu de nulle part, celle qui venait de s’écouler avait été la plus clémente. Notre campement à moins de mille mètres dans une petite clairière moussue à deux pas du torrent devait y être pour beaucoup, vu que pour la première fois nous ne nous étions pas couchés immédiatement après la tombée du jour en priant pour le retour le plus rapide possible du soleil.


Il faut reconnaître que nous avions été un peu optimistes sur nos capacités physiques et morales, et que le rude climat commençait à nous peser fortement. Encore une journée et une nuit avant de reprendre le train pour nos pénates, croyions nous… Nous marchions le long de la colline, mais personne n’était très enjoué. Nous prîmes un repas rapide sur le bord de la route. Il bruinait. Et puis quelqu’un posa la question qui était sur toutes les lèvres, muette : « Est-ce que vous avez vraiment envie de passer une quatrième nuit ici ? »

Quelques heures plus tard, nous étions dans le train, au chaud, les pieds encore mouillés d’avoir traversé une rivière à gué, les cheveux collés d’avoir foncé sous la pluie vers la gare. De notre cabine devait émaner un remugle de sueur, de crasse, de sang et d’eau croupie ; en tous cas, personne ne nous a dérangés. Nous étions penauds, un peu la queue entre les jambes, mais heureux. Personnellement, j’avais retrouvé goût à la vie après ce début d’année dépressif. La beauté et la tranquillité de ce que nous avions croisés les jours précédents m’avaient remis le cerveau dans un état correct.

Encore quelques heures plus tard, lavé et rasé de frais, je ressortais illico de chez moi pour me diriger, un grand sourire aux lèvres, vers feu la Taverne du Saint Graal.

Et encore quelques heures plus tard, je tenais compagnie à une demoiselle en larmes qui attendait le bus, et que je n’avais jamais vue avant cette journée.

C’était le 15 avril 2001.